Insuffisance rénale chronique : découverte du rôle crucial d’un biomarqueur

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Dre Marie-Josée Hébert, Francis Migneault et Dre Héloïse Cardinal

Dre Marie-Josée Hébert, Francis Migneault et Dre Héloïse Cardinal

Des millions de patients atteints de maladies rénales pourraient bénéficier d'un diagnostic précoce et de mesures de prévention grâce à la percée des scientifiques du CRCHUM.

Une équipe du CRCHUM identifie pour la première fois un microARN capable de protéger les petits vaisseaux sanguins et d’améliorer la survie des reins ayant subi de graves lésions.

Pour les quatre millions de personnes atteintes d’insuffisance rénale chronique au Canada, cette avancée scientifique pourrait avoir des répercussions majeures en matière de prédiction et de prévention.

Jusqu’à maintenant, aucun biomarqueur fiable ne permettait d’évaluer l’état de santé de ces vaisseaux capillaires et de développer des approches ciblées pour préserver la fonction rénale.

Dans une récente étude publiée dans JCI Insight, les Dres Marie-Josée Hébert et Héloïse Cardinal, cotitulaires de la Chaire Shire en néphrologie et en transplantation et régénération rénales de l’Université de Montréal, et Francis Migneault, associé de recherche dans l’équipe de la Dre Hébert, démontrent que le microARN miR 423-5p est un marqueur sanguin prometteur pour prédire la santé microvasculaire du rein.

Au Centre de recherche du CHUM (CRCHUM), l’équipe de recherche étudie la perte de capillaires péritubulaires, un indicateur probant de l’insuffisance rénale chronique.

Situés dans les reins, ces millions de petits vaisseaux sanguins filtrent les déchets du sang et apportent l’oxygène et les nutriments nécessaires au bon fonctionnement de l’organe.

Certaines lésions rénales, causées par l’interruption temporaire de l’apport sanguin suivie de sa reprise, entraînent parfois une réduction du nombre de petits vaisseaux, et perturbent fortement le fonctionnement des reins.

« Chez les personnes transplantées, si la fonction rénale est gravement altérée, la survie du rein est menacée. Basé sur ce biomarqueur, un test pourrait être développé pour évaluer beaucoup plus tôt la perte ou non de petits vaisseaux sanguins », explique la Dre Hébert, néphrologue-transplanteuse au CHUM et vice-rectrice sortante à la recherche, à la découverte, à la création et à l’innovation à l’Université de Montréal.

« À l’hôpital, les médecins pourraient ainsi mieux évaluer la santé microvasculaire des personnes à risque, par exemple, les personnes âgées ou amenées à subir des chirurgies où le flux sanguin est temporairement suspendu. C’est le cas des greffes d’organes ou des interventions cardiovasculaires. »

Des souris et… 51 personnes transplantées

« Nous avons d’abord observé sur des souris que le niveau du microARN miR-423-5p fluctuait dans le sang en cas de lésion rénale aiguë. Ces résultats ont été ensuite

confirmés chez 51 personnes transplantées qui participent à la biobanque en transplantation rénale du CHUM », dit Francis Migneault, premier auteur de l’étude.

Grâce au biomarqueur, les équipes cliniques pourraient vérifier si leurs interventions améliorent l’état de santé des petits vaisseaux ou, au contraire, la diminuent.

« Mais, le plus incroyable, c’est qu’en injectant ce microARN chez des souris ayant subi une lésion rénale, nous sommes parvenus à préserver les petits vaisseaux sanguins et à limiter les dommages faits aux reins. »

Bien que l’injection directe dans le rein soit une méthode cliniquement faisable au moment de la transplantation, l’équipe scientifique du CRCHUM envisage plutôt pour l’instant de recourir à des techniques alternatives pour transporter le microARN, ou probablement un cocktail de microARN, jusqu’au rein afin de protéger les petits vaisseaux restants.

Des petits vaisseaux partout!

En matière de prévention, un test, basé sur le microARN miR-423-5p, pourrait aussi être utilisé chez les personnes atteintes d’insuffisance cardiaque, d’insuffisance pulmonaire ou de certaines maladies neurodégénératives.

« Dans le cas de ces conditions médicales, la perte de petits vaisseaux sanguins, associée au vieillissement normal ou accéléré, joue un rôle clé. Notre découverte pourrait ainsi avoir des retombées immenses sur le suivi de la santé de la population canadienne », affirme la Dre Hébert.

Du côté de la santé pulmonaire, des projets de recherche sont déjà en cours avec la chercheuse et responsable de l’axe Immunopathologie du CRCHUM, Emmanuelle Brochiero.

Par l’intermédiaire de la biobanque de matériel biologique du CHUM, la Dre Hébert estime qu’il serait aussi possible de déterminer si des médicaments existants, et donnés après une greffe rénale pour traiter une autre cause, améliorent ou détériorent la santé des petits vaisseaux sanguins.

Rédaction : Bruno Geoffroy

À propos de cette étude

« Endothelial extracellular vesicle miR-423-5p regulates microvascular homeostasis and renal function after ischemia-reperfusion injury » par Francis Migneault sous la supervision de la Dre Marie-Josée Hébert et de ses collègues, a été publié en ligne le 22 mai 2025 dans la revue JCI Insight. Les résultats de cette étude ont fait l’objet d’une demande de brevet provisoire US 63/777,825 intitulée « Methods and agents for assessing and promoting microvascularization » déposée le 26 mars 2025.

Ces travaux de recherche ont été financés par les Instituts de recherche en santé du Canada, la Chaire Shire en néphrologie, transplantation et régénération rénales de

l’Université de Montréal, la Fondation J.-Louis Lévesque, le Programme de recherche en don et transplantation du Canada, le Fonds de recherche en Santé du Québec et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Ils ont été appuyés par les équipes de la plateforme de pathologie moléculaire et de l’animalerie.

La Dre Hébert, la Dre Cardinal, Francis Migneault et les membres de leur équipe tiennent à remercier les patientes et les patients du CHUM pour leur participation à la biobanque en transplantation rénale du CHUM, ainsi que les membres du personnel clinique et de recherche qui veillent à la pérennité de la biobanque.

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