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Cancer de la prostate et imagerie : la Dre Cynthia Ménard décroche une subvention de 3M$

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Entrevue à distance. Pandémie oblige. De l’autre côté de l’écran d’ordinateur, la Dre Cynthia Ménard dégage une sérénité qu’on ose croire à l’épreuve du temps. La chercheuse du centre de recherche du CHUM (CRCHUM) a reçu une subvention de près de 3 M$ de la Société canadienne du cancer et de la Fondation Movember pour mener avec son équipe un essai clinique national de phase 3 auprès de plus de 750 patients à risque d’un cancer de la prostate avancé.

Objectif? Déterminer si une technique d’imagerie, nommée TEP/TDM au PSMA, peut permettre de guider plus efficacement les traitements de radiothérapie et les interventions chirurgicales en fournissant une image plus précise de l’étendue de la maladie.

L’acronyme TEP/TDM au PSMA, quelque peu barbare, cache en réalité la combinaison de la tomodensitométrie (TDM) à la tomographie par émission de positrons (TEP) d’un radiotraceur ciblant l’antigène de la membrane spécifique de la prostate (PSMA). En détectant la présence d’une protéine — la PSMA — à la surface de cellules cancéreuses de la prostate, cette technique d’imagerie est capable de localiser la propagation du cancer dans le corps avec une efficacité supérieure à celle des techniques d’imagerie traditionnelles.

L’essai clinique de la Dre Ménard entre dans sa phase de recrutement au mois de novembre. Nous en discutons avec la radio-oncologue au CHUM et professeure à l’Université de Montréal (Département de radiologie, radio-oncologie et médecine nucléaire).

Q1. Que souhaitez-vous accomplir grâce à cette subvention majeure?

R. De nombreuses études ont déjà démontré l’apport inestimable de la TEP/TDM au PSMA au niveau du diagnostic du cancer de la prostate. C’est d’autant plus vrai avec la nouvelle génération de radiotraceurs TEP comme le 18F-DCFPyL, bien connu des spécialistes, que nous utilisons et sommes capables de produire avec le cyclotron du CRCHUM. Aujourd’hui, nous détectons mieux les sites de cancer comparativement à l’imagerie classique seule.

Par contre, aucun essai clinique n’a encore documenté si l’intensification de la radiothérapie ou de la chirurgie, basée sur les résultats obtenus par cette technique d’imagerie, améliore l’efficacité du traitement en diminuant le taux de récidive du cancer de la prostate.

Avec notre essai contrôlé randomisé de phase 3, nous pourrons déterminer si cette approche thérapeutique est meilleure que les standards médicaux actuels et vérifier que les effets secondaires, s’il y en a, demeurent acceptables par rapport aux avantages du traitement. Nous pourrons aussi évaluer s’il y a une amélioration globale de la qualité de vie des patients à long terme.

Q2. Selon vous, pourquoi cet essai est-il important pour les patients et pour la pratique médicale?

R. Ce projet de recherche est la suite d’un essai clinique de phase 2, initié en 2018 au CHUM. Il montrait déjà que les patients, passant une TEP/TDM au PSMA avant leur traitement, voyaient une intensification de leurs traitements de radiothérapie : dose plus importante ou ciblage de sites cancéreux non répertoriés par l’imagerie traditionnelle.

Pour nos patients à risque de cancer avancé, c’est sûr que nous espérons que notre essai pancanadien de phase 3 démontrera un avantage, ce qui se traduirait par un changement de la pratique de la radiothérapie et de la chirurgie. Mais, pour l’instant, nous en sommes seulement au début de cette aventure.

Avec l’aide d’autres hôpitaux à travers tout le Canada, nous recruterons pendant trois ans 776 patients atteints d’un cancer de la prostate localisé à risque et qui doivent subir, de façon curative, une radiothérapie ou une intervention chirurgicale. Les patients faisant état d’une récidive de cancer après une prostatectomie pourront aussi participer.

En comparaison avec le groupe contrôle, les personnes faisant partie du groupe expérimental passeront une TEP/TDM au PSMA avant leur traitement. À partir des résultats, les médecins pourront ajuster la radiothérapie ou la chirurgie aux endroits ciblés.

Q3. Si les résultats de cet essai sont concluants, quels impacts auront-ils sur les Canadiens?

R. Dans la pratique clinique, la TEP/TDM au PSMA fait son chemin. Que ce soit au Canada ou dans le monde. Par contre, sans données probantes sur la diminution des taux de récidives du cancer et l’amélioration de la qualité de vie des patients, les autorités de santé canadiennes (Santé Canada, ministère de la Santé des provinces, etc.) ne peuvent pas décider si elles devraient rembourser ou non cette nouvelle technique d’imagerie et la proposer à un large éventail de patients.

Cette question de la rentabilité et d’analyse économique, nous l’abordons dans notre essai clinique grâce à l’expertise de nos collègues de l’Université d’Alberta.

Dans les prochaines années, les données issues de notre étude seront donc cruciales pour évaluer l’impact et la valeur de la TEP/TDM au PSMA dans notre arsenal de soins du cancer de la prostate.

Cancer de la prostate et imagerie : la Dre Cynthia Ménard décroche une subvention de 3M$

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