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Fibrose kystique : découverte d'une molécule clé pour améliorer les traitements

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Des chercheurs du Centre de recherche du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CRCHUM) identifient une piste prometteuse pour améliorer les traitements offerts aux personnes atteintes par la fibrose kystique.
 
Cette avancée publiée récemment dans Frontiers in Cellular and Infection Microbiology pourrait mener au développement de nouvelles thérapies personnalisées dans un futur proche.
 

« Le fait d'ajouter aux médicaments actuels une molécule appelée inhibiteur de Quorum Sensing réduit la production de certains résidus néfastes par les bactéries et restaure l'efficacité des traitements existants sur les cellules de patients fibrose kystique », explique Emmanuelle Brochiero, chercheuse au CRCHUM et professeure à l'Université de Montréal.

La fibrose kystique est une maladie génétique mortelle qui touche les enfants et les adultes. Elle se manifeste par une surproduction de mucus dans plusieurs organes, des infections bactériennes répétées et la destruction progressive des poumons. Il n'existe pas de cure à ce jour. Lorsque la maladie est trop avancée, la seule option est de réaliser une transplantation pulmonaire.

Une des difficultés rencontrées dans la recherche en fibrose kystique est la variabilité de la maladie d'un patient à l'autre. En effet, il existe plus de 2 000 mutations génétiques possibles. Deux traitements sont offerts à certains patients depuis moins d'une dizaine d'années : le Kalydeco pour les personnes présentant un type de mutations rares (moins de 4 % des patients), et l'Orkambi pour la mutation la plus fréquente (79 % des patients). Malheureusement, ces deux médicaments ont une efficacité limitée. 

L'équipe d'Emmanuelle Brochiero cherche à comprendre pourquoi. Avec le consentement des patients, elle collecte des cellules nasales et réutilise également les poumons retirés aux patients atteints de fibrose kystique au moment de la transplantation pulmonaire. Les scientifiques arrivent ensuite à recréer dans leur laboratoire le tissu épithélial respiratoire grâce au génie tissulaire pour étudier la maladie et tester des approches thérapeutiques. 

« Les personnes malades de la fibrose kystique présentent des défauts génétiques qui causent une production anormale d'une protéine appelée CFTR dans les cellules et un excès de mucus dans les organes. Les médicaments actuels agissent afin de corriger le défaut de la protéine CFTR. En milieu aseptique in vitro, les traitements Kalydeco et Orkambi fonctionnent bien. Mais dans la vraie vie, les poumons des patients malades sont colonisés par les bactéries, en particulier Pseudomonas aeruginosa. Plusieurs évidences indiquaient que les bactéries pouvaient interférer avec le traitement. Grâce à cette étude, nous avons pu déterminer quelles substances relâchées par les bactéries pouvaient nuire à l'efficacité des traitements », résume la professeure Brochiero.

Certaines de ces particules néfastes sont sous contrôle d'un gène bactérien appelé quorum sensing lasR. « Au cours de la maladie, ce gène bactérien va muter et la production de produits néfastes va varier. Nos travaux confirment que différentes souches de bactéries, selon qu'elles proviennent d'infections aigües ‒ surtout chez les jeunes patients ‒ ou d'infections chroniques ‒ surtout chez les patients plus âgés ‒ n'altèrent pas de la même manière l'efficacité des traitements », dit Émilie Maille, assistante de recherche dans le laboratoire d'Emmanuelle Brochiero et première auteure de l'étude.

Ensuite, les chercheurs ont testé in vitro l'impact d'un ajout d'un inhibiteur de Quorum Sensing, de la famille des furanones. « Nous avons démontré que cette molécule, en réduisant la production de résidus néfastes par les bactéries, préserve l'efficacité des traitements dans les cellules des patients atteints de fibrose kystique », résume Emmanuelle Brochiero. 

D'autres recherches doivent être menées afin de confirmer l'efficacité et l'innocuité des inhibiteurs de quorum sensing qui pourraient éventuellement être offert en complément aux médicaments actuels. 

Mais déjà, cette étude ouvre une nouvelle voie de médecine personnalisée en fibrose kystique. « En utilisant les cellules collectées chez les patients, nous pensons qu'il serait possible de tester et prédire l'efficacité des traitements tels que le Kalydeco et Orkambi, en fonction des bactéries prélevées chez chaque patient. Nous allons aussi évaluer la capacité des traitements à réparer le tissu des poumons lésés. Et enfin, il s'agira d'identifier les molécules les plus efficaces, telles que les inhibiteurs de quorum sensing bactérien, pour contrecarrer l'effet néfaste des infections. L'objectif ultime est d'améliorer les traitements pour les patients et ainsi prolonger leur vie », conclut Emmanuelle Brochiero.

À propos de cette étude

L'étude « Qurorum Sensing Down-Regulation Counteracts the Negative Impact of Pseudomonas aeruginosa on CFTR Channel Expression, Function and Rescue un Human Airway Epithelial Cells » a été publiée le 10 novembre 2017 dans Frontiers in Cellular and Infection Microbiology. Cette étude a été pilotée par Emmanuelle Brochiero au Centre de recherche du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CRCHUM), avec la collaboration du groupe de Dao Nguyen à l'Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGilll. Les travaux ont été financés principalement par Fibrose kystique Canada, les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), Vaincre la Mucoviscidose et les Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS).  Consultez l'étude : DOI : 10.3389/fcimb.2017.00470

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