Faire mordre la poussière au cancer

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Gerardo Ferbeyre

En arrivant au CRCHUM en 2018, Gerardo Ferbeyre emportait son expérience en recherche fondamentale sur les mécanismes de protection du corps contre le cancer et son point de vue unique de biochimiste. Ce qui l’attirait, c’était la possibilité de voir comment ses travaux pouvaient renforcer la recherche clinique, plus près de la réalité des patients.

Alors recruté au CRCHUM par l’axe Cancer sous la direction d’Anne-Marie Mes-Masson, il a contribué à des découvertes importantes sur le métabolisme des cellules cancéreuses. Aujourd’hui titulaire de la Chaire CIBC en recherche sur les causes du cancer du sein de l’Université de Montréal et responsable de l’axe Cancer depuis le 1er mai 2024, il poursuit ses recherches sur la sénescence cellulaire-un état de dormance où les cellules arrêtent de se diviser — et les thérapies anticancer.

Un traitement prometteur

Gerardo Ferbeyre a d’ailleurs obtenu en août 2023 une bourse de 2,4 M$ de l’Institut de recherche Terry Fox pour mener des travaux visant à prévenir la résistance à la chimiothérapie en ciblant les cellules sénescentes, qui semblent échapper aux traitements et contribuer à la récurrence des cancers, notamment de la prostate et du pancréas.

La méthode innovante mise au point par ses collègues et lui, appelée « crochet-uppercut » (one-two punch, en anglais), consiste à induire la sénescence des cellules cancéreuses, c’est-à-dire leur vieillissement prématuré, pour ensuite les éradiquer.

La recherche fondamentale du laboratoire est d’abord effectuée à l’aide d’animaux de l’animalerie du CRCHUM. Les scientifiques font également appel à la plateforme de biobanques du CRCHUM pour obtenir des échantillons de tissus cancéreux humains et à celle de microfluidique pour observer les effets de la stratégie crochet-uppercut sur ces derniers et ainsi confirmer l’efficacité de la méthode.

Une découverte déterminante

Un autre fait marquant de la dernière année pour le laboratoire de Gerardo Ferbeyre est sans contredit la publication d’un article signé par Stéphane Lopes-Paciencia et d’autres chercheurs de son équipe dans la prestigieuse revue Cell Reports, dans lequel on établit le rôle crucial de la chromatine dans la réponse des cellules au stress oncogénique. 

En effet, lorsqu’elles détectent la présence d’un stress qui favorise l’apparition de tumeurs, les cellules peuvent mettre en place des réponses, telles que la mort cellulaire ou la sénescence cellulaire, empêchant par le fait même la prolifération de cellules potentiellement tumorales. Les chercheurs ont observé que le stress oncogénique ouvre la chrom tine — une substance qui emballe et organise l’ADN dans les cellules —, et que cette ouverture peut être induite artif ciellement pour accélérer la sénescence.

Et Gerardo Ferbeyre relève un fait étonnant : « La recherche des 50 dernières années portait surtout sur la partie codante du génome, qui représente seulement 5 % de l’ensemble du génome. Le reste demeure un mystère et nous avons trouvé que le processus d’ouverture de chromatine, qui survient pendant la sénescence, cible cette région non codante. » En exposant la chromatine non codante à différents médicaments, on peut donc induire la sénescence. L’étude révèle aussi que la chromatine conserve une mémoire du stress oncogénique — une voie intéressante à exploiter dans l’élaboration de thérapies anticancéreuses. 

Par ses recherches et ses différents rôles, M. Ferbeyre souhaite laisser sa marque à plusieurs points de vue : « Sur le plan humain, j’espère contribuer à diminuer la souffrance humaine. Comme chercheur, j’aimerais découvrir des réponses aux grandes questions qui n’ont pas encore été résolues par la science. À titre d’enseignant, je suis fier de former les nouvelles générations qui prendront la relève. Et comme directeur de l’axe Cancer, j’aimerais suivre les traces d’excellence de la personne qui m’a précédé. »


Ce portrait est tiré de notre rapport d'activités 2023-2024

 

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